Changement de plan pour ce 3ème épisode des chroniques de la Corée, les événements de ce soir ayant été d'une trop grande importance pour être passés sous silence. Nous allons donc vous raconter cette terrible soirée du 14 août, le jour où la pluie torrentielle a eu raison de nous.
Tout se passait pourtant comme d'habitude en ce jour tranquille, alors qu'un jour férié s'annonçait le lendemain et que nous étions particulièrement productifs comme à notre habitude. Comme j'avais prévu de cuisiner un plat un peu compliqué le lendemain, je me suis dit que c'était le moment d'aller faire les courses à Homeplus, notre hypermarché préféré situé du côté opposé à nos appartements par rapport à Inha. En plus cela nous offrait la possibilité de dîner à Lotteria, le McDonald's coréen qui est situé dans Homeplus, et qui refuserait un burger avec des frites?
C'est donc l'esprit léger que nous fuyons le laboratoire à 18h ... Cependant le ciel qui a été bleu toute la journée avait déjà tourné au gris au moment où nous partons. "T'as pris ton parapluie ?" demande Jérémie, "parce que j'ai pas le mien en tout cas". "Nan mais ça va aller, on va espérer de rentrer à temps" je réponds, insouciant que je suis...
Nous nous dirigeons donc gaiement - j'exagère un peu quand même - vers ce lieu béni qu'est Homeplus, béni parce que c'est notamment là-bas qu'on peut acheter notre dose hebdomadaire de Nutella.
Pas grand chose à mentionner à partir de ce moment-là, on a le traditionnel bafouillement en coréen à la caisse de Lotteria, la dépense -presque- habituelle à Homeplus avec moi qui passe cette fois pour un cuisinier professionnel en prenant des produits rayon légumes comme je ne l'ai jamais fait et en acceptant de payer 5500 wons (presque 4euros) pour un paquet minuscule de mozarella à 125g -oui je suis faible- et Jérémie qui passe pour l'étudiant d'informatique standard en empilant les boîtes de chips et les tablettes de chocolat en tant qu'éléments constitutifs de ces repas.
Une fois le second bafouillement effectué cette fois à la caisse de Homeplus pour demander les sacs EN CARTON - c'est important pour la suite -, nous repartons de Homeplus avec un sentiment de devoir accompli, même si je n'ai toujours pas trouvé de lardons au milieu de tous les types de bacon disponibles en tranches fines.
L'intro était longue, et c'était volontaire mais c'est maintenant que commence la partie Fail. Alors que nous en train de parler du fait qu'il fait déjà nuit dehors à 19h30 et que c'est assez déprimant, nous franchissons la porte de sortie et là! Des trombes d'eau! Un véritable typhon s’abat sur Homeplus, à tel point qu'on peut croire que les dieux coréens se vengent de toute nos fuites effectuées du labo à 18h au lieu des 22h recommandées.
"Que fait-on?" s'interroge-t-on. Après quelques secondes de réflexion et avoir cherché des yeux un taxi à l'extérieur, on décide qu'il n'est pas possible de sortir dans ces conditions et qu'il va falloir retourner dans Homeplus pour acheter un parapluie. Je m'y colle donc, vu que mon pauvre parapluie français a de toute façon presque rendu l'âme. Fort heureusement je trouve assez rapidement un parapluie à 9000 wons (un peu plus de 6euros) et en plus estampillé Guy Laroche Paris donc je me dis que c'est la qualité française dans la conception.
Il est donc temps de se jeter sous la pluie, pas littéralement bien sûr, mais de presser le pas pour rentrer vite chez nous. Voilà maintenant une description des événements après l'instant T de la sortie de Homeplus :
Une petite carte google pour que vous puissiez suivre : en rouge les endroits importants, en violets les endroits où nous avons Fail. |
T+10sec : nous nous rendons compte immédiatement que le parapluie n'est pas assez grand pour deux, je reçois la pluie sur le côté gauche et Jérémie sur le côté droit. "Ce n'est pas encore si grave" pensons-nous. Et de toute façon, avec trois sacs, nous n'aurions pas eu assez de mains pour 2 parapluies.
T+30sec : Nous commençons à espérer qu'un taxi soit au feu rouge. Le périple vient juste de commencer et il nous reste encore un long chemin pour arriver sains et saufs. Éviter les torrents qui se forment sous nos pieds requiert une attention de tous les instants, et aucune erreur ne peut être tolérée.
T+3min : alors qu'on aperçoit la grande porte principale d'INHA, je remarque la poignée de mon sac en carton côté gauche, exposée à la pluie commence à lâcher.
T+3min30sec, au moment où nous atteignons le feu rouge pour traverser et rejoindre Inha, la première victime de la pluie est cette poignée mentionnée, et je me vois donc obligé de porter ce sac par en-dessous
T+4min : après avoir traversé le passage piéton et passé la porte principale, ma bouteille de jus d'orange décide de se faire la malle dans le sac côté gauche et passe à travers le sac pour tomber par terre en plein milieu du parking inondé. Jérémie semble lui toujours à peu près épargné, car il ne tient qu'un sac qui est abrité sous le parapluie. Un trou se forme malgré tout dans le sac en question et on aperçoit ma brique de lait qui n'est pas loin de tomber elle aussi.
T+4min20 : suite à la mort instantanée du sac Homeplus de gauche, je me mets à répartir les affaires de ce sac entre mon sac en cuir que je porte en bandoulière et le sac à dos de Jérémie. Tout ça sous la pluie, en plein milieu du parking, sous le regard de l'agent de sécurité dans sa cabine. Jérémie croit apercevoir un sourire moqueur sur son visage, mais ce n'est peut être qu'une illusion sous cette pluie battante.
T+5min : nous repartons pour continuer ce périple, et n'abandonnons pas malgré la perte tragique du premier sac. Nos jeans imbibés d'eau n'aident pas à accélérer le pas, et le désespoir commence à nous gagner.
T+6min : mon deuxième sac commence à rendre l'âme aussi, et toutes mes courses tombent une par une sous mon regard impuissant. Les arrêts se multiplient et mon sac en cuir commence à être rempli au fur et à mesure que je transvase les éléments du sac Homeplus agonisant vers celui-ci. Le seul survivant semble être le sac Homeplus de Jérémie, bien qu'il ait également souffert gravement. Nous atteignons les bâtiments principaux d'INHA et envisageons de faire un crochet par le laboratoire pour poser tout ce qui n'a pas besoin d'aller au frais et de revenir plus tard pour le reste. Revenir au laboratoire après 19h ? Cela n'était pas arrivé depuis longtemps et montre bien à quel point notre situation est critique.... Et cette pluie qui continue à tomber... la fin nous semble proche et nous n'en finissons plus de patauger dans les torrents qui traversent l'université au fur et à mesure que les courses tombent de ce qui reste des sacs Homeplus.
T+7min : nous atteignons avec difficulté un abri près de notre banque : Hana bank, où un bilan de la situation s'impose. Nous avons déjà subi bien trop de pertes pour continuer ainsi ...
T+8min : un plan de survie est mis au point. L'un de nous va retourner à l'appartement uniquement avec mon sac en cuir et le ridicule - mais résistant - sac Kose de Jérémie acheté à DC, pour ramener les courses qui sont en péril, c'est-à-dire les produits frais. L'autre attendra avec le reste des courses à l'abri dans le batiment.
T+10min : après avoir placé tous les produits dans les sacs respectifs, Jérémie décide courageusement de repartir seul sous ce déluge. Je veillerai donc sur les autres courses restantes.
Les joies de la pluie en Corée ... Bon, on triche un peu, cette photo n'a été prise qu'au retour de Jérémie |
T+15min : Jérémie gravit avec difficulté l'escalier derrière le laboratoire qui s'est transformé en torrent de boue à cause de la pluie. Entre le parapluie, la sacoche, le sac à dos et le sac Homeplus survivant qui n'a plus qu'une poignée, l'opération est périlleuse.
T+16min : Jérémie passe à côté du pédalo construit pas les coréens derrière le laboratoire. Ils savaient que le déluge allait arriver. L'endroit étant facilement inondable, si le niveau de l'eau monte encore un peu, le pédalo va flotter.
T+16min : Jérémie passe à côté du pédalo construit pas les coréens derrière le laboratoire. Ils savaient que le déluge allait arriver. L'endroit étant facilement inondable, si le niveau de l'eau monte encore un peu, le pédalo va flotter.
T+20min : seul dans ce bâtiment (ignorant où en est mon partenaire) et observant le déluge à l'extérieur, je m'interroge sur les chances de survie de Jérémie, et aussi de mes courses.
T+25min : Jérémie atteint l'appartement juste au moment où le dernier sac Homeplus (le sien), qui jusque là avait tenu grâce au parapluie, décide de rendre l'âme. Il n'avait déjà plus qu'une poignée et souffrait de fuite par 3 trous, il était temps ...
T+25min : Jérémie atteint l'appartement juste au moment où le dernier sac Homeplus (le sien), qui jusque là avait tenu grâce au parapluie, décide de rendre l'âme. Il n'avait déjà plus qu'une poignée et souffrait de fuite par 3 trous, il était temps ...
T+35min : l'inquiétude me gagne (je ne sais toujours pas où en est Jérémie). Même si j'ai quelques provisions à côté de moi, en l’occurrence les courses restantes, je suis pris au piège dans ce bâtiment et je ne vois toujours pas Jérémie revenir.
T+40min : alors que la situation me paraît perdue, j’aperçois l'ombre de Jérémie qui est finalement de retour en vie, avec son parapluie et le mien. Le sauvetage des courses a été un succès, et nous sommes presque assurés de pouvoir nous en sortir .
T+53min : le retour s'est effectué sans accro et sans fail supplémentaire. Nous nous attendions à ce qu'un de nos parapluies lâche à cause du vent, histoire de finir la journée en beauté, mais ils ont tenu bon. Seul fait notable, nous avons croisé en chemin un coréen en combinaison de plongée, lui aussi savait pour la pluie ! Nous avons finalement atteint victorieusement nos appartements respectifs. Étonnamment, aucune victime n'est à déplorer au niveau des courses, excepté quelques morceaux de terre sur mon sachet de mozarella à 5500wons...
Le retour de Jérémie avec le parapluie pourfendeur de tempêtes du magasin DC |
Néanmoins, cette aventure a suffisamment marqué nos esprits et nous avons décidé de vous la conter à vous, lecteurs de ce blog, pour que vous puissiez voir à quel point la vie en Corée peut-être parfois dangereuse. Surtout lorsque l'on sort sans parapluie...
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